Si la notion d’humanités numériques (digital humanities en anglais) est apparue il y a une vingtaine d’années, il est toujours difficile de nos jours d’en trouver une définition précise...

 

...Même l’excellent état des lieux commandé par l’Institut Français en 2014 à Marin Dacos et Pierre Mounier [1], tout au long de ses 90 pages et malgré ses nombreuses références, n’en apporte pas une définition claire.

 

Nous pensons toutefois qu’il n’est pas suffisant d’accoler le terme « numérique » aux sciences sociales pour en faire des humanités numériques, car alors la notion se retrouve vide de sens : à l’évidence, l’utilisation d’ordinateurs ou la manipulation de documents numérisés ne suffisent pas pour se dire praticien des humanités numériques. En effet, l’utilisation des ordinateurs s’étant répandue à grande échelle dans tous les domaines de notre société et à tous les niveaux, les utiliser n’est plus une spécificité en soi. Les recherches en sciences sociales n’échappent pas à ce constat. Anne Burdick et al. (2012)[2] en concluaient que « l’ère des humanités numériques vient juste de commencer, mais elle pourrait déjà toucher à sa fin ».

 

C’est pourquoi, pour les chercheurs de l’Institut MICA il ne peut y avoir d’humanités numériques que dans la mesure où des chercheurs en sciences sociales sont associés fortement à des chercheurs en informatique (ou plus généralement en technologies de l’information) dans le cadre de projets communs. Seule cette association forte de ces deux catégories d’experts peut déboucher sur de nouveaux paradigmes, de nouveaux concepts et donc de nouvelles applications : tel est le programme des humanités numériques.

 

Depuis plusieurs années les chercheurs experts des technologies de l’information de l’Institut MICA se sont associés à des chercheurs en sciences sociales – linguistes, ethnologues ou historiens – dans le cadre de projets de recherche communs.

 

Parmi les projets de cette nature réalisés à l’Institut MICA, on peut citer : le projet SEPIA[3] mené avec l’Ecole Française d’Extrême Orient (EFEO), les projets portant sur l’archivage pérenne et la valorisation de collections patrimoniales (KRAP[4], collection Au Co[5], DoReMiFa[6]), les projets d’études mariant les études linguistiques et les technologies vocales autour des langues dites « peu dotées » ou des langues en danger de minorités de la région Asie du Sud-Est (PI Languages[7], APPSy[8], APRIL[9]), le projet sur l’identification des plantes médicinales du Vietnam, ou dernièrement le projet TAPASSA[10] en cours avec, de nouveau, des historiens de l’EFEO.



[1] Marin Dacos & Pierre Mounier, Humanités Numériques, Etat des lieux et positionnement de la recherche française dans le contexte international, Institut Français, ISBN 9782354761080/9782354761097, 2014

[2] Anne Burdick, Johanna Drucker, Peter Lunenfeld, Todd Presner, Jeffery Schnapp, Digital_Humanities, The MIT Press, Cambridge, Massachusetts London, England, 2012, ISBN 978-0-262-01847-0

[3] SEPIA « Système d’Etude du Patrimoine des Inscriptions Anciennes du Vietnam », 2007-2008

[4] KRAP « Khmer Rouge Achives Preservation », pré-projet AUF, 2013-2014

[5] http://www.mica.edu.vn/research-actions/au-co-project/

[6] DoReMiFa « Données des Recherches Linguistiques de Michel Ferlus en Asie du Sud-Est », projet de la BSN, 2014-2016

[7] http://pi.imag.fr/xwiki/bin/view/Main/

[8] APPSy « Asymétries Phonétiques et Phonologiques de la Syllabe », projet ANR « Blanc » 2010-2015

[9] APRIL « Avancées dans le Prototypage Rapide pour l’Informatisation des Langues », Projet PEPS HuMaIn de la mission pour l’interdisciplinarité du CNRS, 2013-2014

[10] TAPASSA « Traduction Automatique Probabiliste Appliquée aux Sciences Sociales en Asie » - EFEO/MICA, 2016